La manière de traiter la Syrie et les réfugiés syriens après la chute du régime Assad reste une question complexe pour le nouveau gouvernement allemand. Malgré une baisse significative du nombre de demandes d’asile émanant de Syriens, ces derniers restent en tête des statistiques sur l’asile : Entre janvier et mars de cette année, les Syriens ont déposé environ 10 000 demandes d’asile, soit deux fois moins qu’au cours de la même période l’année dernière. Toutefois, depuis décembre 2024, date du renversement de Bachar el-Assad, l’Office fédéral des migrations et des réfugiés (BAMF) a cessé de traiter ces demandes.
La raison en est que la situation en Syrie n’est pas encore suffisamment claire : Si tel est le cas, les Syriens ne pourront plus bénéficier de la protection subsidiaire, qui a été accordée à des dizaines de milliers d’entre eux depuis le début de la guerre civile. Cela pourrait également signifier que les Syriens vivant déjà en Allemagne pourraient être invités à rentrer chez eux, et que les expulsions pourraient redevenir possibles. Le gouvernement précédent n’a pas répondu à ces questions, bien que l’ancienne ministre de l’intérieur, Nancy Wieser, se soit rendue en Syrie et ait eu des entretiens à ce sujet.
Mais la coalition « feux tricolores »(la coalition au pouvoir) a pris une autre mesure : Elle a inclus la Syrie dans le programme d’aide au retour de la BAMF, qui fournit un soutien financier pour les retours volontaires. Selon le ministère de l’intérieur, 464 personnes ont utilisé cette aide fédérale pour retourner en Syrie entre la mi-janvier (date de lancement du programme) et la mi-avril. Les retours ont été organisés dans le cadre du programme gouvernemental REAG/GARP.
Les taux de subvention sont clairement définis : Chaque personne reçoit une aide au voyage de 200 euros. En outre, les adultes de plus de 18 ans et les mineurs non accompagnés reçoivent 1 000 euros d’aide au démarrage ; les enfants et les adolescents reçoivent 500 euros. L’assistance médicale est également couverte. Une famille seule peut recevoir jusqu’à 4 000 euros. Pendant des années, le gouvernement fédéral a refusé de soutenir financièrement ces retours, craignant d’être perçu comme finançant indirectement le régime d’Assad. Certains États fédéraux ont proposé des programmes similaires, mais ils ont rarement été utilisés.
La situation dans ce pays déchiré par la guerre reste instable et les conditions de vie varient considérablement d’une région à l’autre. C’est pourquoi l’ancien ministre de l’intérieur, M. Wieser, souhaitait autoriser les « voyages d’exploration » pour les Syriens. Le gouvernement fédéral a envisagé une idée similaire au cours de l’été dernier, lorsqu’il a introduit le nouveau paquet de mesures de sécurité après l’attentat de Solingen. L’objectif était alors de lutter contre le phénomène des voyages répétés de certains migrants – ayant déjà obtenu une protection en Allemagne – et qui se rendent fréquemment dans leurs pays d’origine.
Entre novembre 2024 et fin mars 2025, le BAMF a engagé plus de 2 000 procédures à l’encontre de réfugiés retournés dans leur pays d’origine. La plupart d’entre eux étaient des Irakiens, des Syriens et des Afghans. Fin mars, 969 000 Syriens étaient enregistrés en Allemagne, dont un tiers bénéficiait d’un statut de protection subsidiaire. Dans le cadre du nouveau paquet de mesures de sécurité, de tels voyages peuvent entraîner le retrait du statut de protection. Sont exclus les voyages pour assister à des funérailles – ou ceux visant à préparer un retour permanent en Syrie.
Les dirigeants de l’Union chrétienne-démocrate (CDU) et de l’Union chrétienne-sociale (CSU) ont vivement critiqué les projets du ministre de l’intérieur du parti social-démocrate (SPD). Torsten Frei, chef de cabinet du nouveau chancelier, a déclaré qu’il était opposé à l’autorisation des voyages individuels en Syrie. Il a insisté sur le fait qu’il devait rester de la prérogative de l’État allemand de déterminer si un retour est possible – ou nécessaire. Le ministre bavarois de l’intérieur, Joachim Herrmann, a mis en garde contre des « déplacements incontrôlables ». Il a également évoqué une question non résolue : les prestations sociales que les migrants peuvent continuer à percevoir en Allemagne tout en effectuant de tels voyages. M. Hermann a annoncé : « Il ne devrait pas y avoir de voyages touristiques sous le couvert de visites exploratoires ».
En revanche, les retours organisés par le biais du programme REAG/GARP de la BAMF sont ordonnés, mais lents. Le site Internet du programme indique que la décision concernant une demande peut prendre jusqu’à huit semaines en raison du grand nombre de demandes. Dans les pays à forte assignation, comme la Syrie, le délai peut aller jusqu’à 12 semaines. Depuis le 13 janvier, les Syriens ont soumis 820 demandes d’aide au retour, mais seules 464 ont été approuvées, selon le ministère de l’intérieur. Ces 820 demandes représentent un total de 1 326 personnes. 82 demandes (concernant 132 personnes) ont été retirées par les demandeurs eux-mêmes.
La lenteur du processus d’examen est évidente dans les chiffres du BAMF : Au 31 mars, 1 745 demandes d’aide au retour étaient encore en cours de traitement. Parmi celles-ci, 571 ont été soumises par des citoyens turcs, 321 par des Syriens et 88 par des Russes. Depuis le début de l’année, 2 157 demandes ont été approuvées, principalement par des Turcs, des Syriens et des Russes. Cependant, une fois approuvé, le retour est dans la plupart des cas définitif : Selon le BAMF, seules quelques personnes ont tenté de revenir en Allemagne après avoir quitté le pays.